Comment optimiser pour Raspberry Pi, Jetson Nano et mobiles
À l’ère de l’intelligence artificielle décentralisée, la reconnaissance d’objets en temps réel sur des dispositifs embarqués devient une nécessité dans de nombreux secteurs : sécurité, mobilité, domotique, industrie, agriculture, santé, et bien d’autres. Grâce à des plateformes comme Raspberry Pi, Jetson Nano ou encore les smartphones, il est désormais possible d’embarquer l’IA au plus près de l’action, sans nécessiter une connexion constante à un serveur distant.
Mais comment faire tourner des modèles de deep learning exigeants sur du matériel aussi limité ? C’est tout l’enjeu des optimisations matérielles et logicielles, qui permettent de combiner performances et légèreté. Plongeons dans cet univers passionnant.
Pourquoi embarquer la reconnaissance d’objets ?
L’approche classique consiste à capturer une image, l’envoyer à un serveur puissant, traiter l’image à distance puis renvoyer le résultat. Cette méthode présente plusieurs limites :
- Latence élevée,
- Dépendance à la connexion réseau,
- Problèmes de confidentialité et de sécurité des données.
À l’inverse, le traitement embarqué permet une prise de décision immédiate, sur site, avec un coût réduit et une plus grande robustesse. Mais cela implique d’adapter les modèles d’IA à des contraintes très spécifiques.
Principaux défis sur les dispositifs embarqués
Les plateformes comme Raspberry Pi ou Jetson Nano disposent de capacités limitées en comparaison avec un PC ou un serveur GPU :
- Moins de RAM (1 à 8 Go en général),
- CPU et GPU beaucoup moins puissants,
- Autonomie souvent critique (batteries, alimentation solaire, etc.),
- Besoins en refroidissement et taille compacte.
Pour y faire face, l’optimisation est la clé.
Techniques d’optimisation pour l’embarqué
1. Modèles légers et efficaces
Utiliser des architectures conçues pour être rapides et compactes :
- MobileNet : excellent rapport précision/poids,
- YOLOv5n (nano) ou YOLOv8n : très bon compromis pour la détection d’objets en temps réel,
- EfficientNet / EfficientDet : modèles efficaces pour classification et détection.
Ces modèles peuvent être pré-entraînés puis fine-tunés sur un jeu de données spécifique.
2. Quantification
La quantification permet de réduire la taille et la complexité d’un modèle en diminuant la précision des poids (ex. : de 32 bits flottants à 8 bits entiers). Cela réduit :
- la charge mémoire,
- les temps d’inférence,
- la consommation énergétique.
TensorFlow Lite et ONNX Runtime supportent très bien ce type d’optimisation.
3. Conversion de modèles pour l’inférence embarquée
Selon la plateforme cible, il faut convertir son modèle :
- TensorFlow Lite (.tflite) pour Android, Raspberry Pi,
- ONNX (.onnx) pour exécution multi-frameworks (PyTorch, TensorFlow, etc.),
- TensorRT (NVIDIA) pour Jetson Nano, avec des performances GPU très élevées.
4. Accélération matérielle
Certains dispositifs embarqués sont équipés d’accélérateurs :
- GPU intégré (Jetson Nano),
- NPU (Neural Processing Unit) dans les smartphones récents,
- Coral USB Accelerator (Edge TPU) pour Raspberry Pi.
Ces composants peuvent multiplier la vitesse d’inférence par 5 à 10 par rapport au CPU seul.
5. Optimisation logicielle et pipeline vidéo
- Utiliser OpenCV pour le traitement des images en temps réel,
- Gérer les flux vidéo avec GStreamer ou Picamera2 (sur Raspberry Pi),
- Appliquer des techniques de réduction de latence : multithreading, frameskipping, détection sur image réduite puis interpolation.
Étude de cas : détection d’objets en temps réel sur Raspberry Pi 5
- Matériel : Raspberry Pi 5 + caméra HQ + Coral USB Accelerator
- Modèle : MobileNet SSD, converti en TensorFlow Lite quantifié
- Pipeline : acquisition via Picamera2, traitement avec OpenCV, affichage en overlay
Résultats :
- 15 à 20 FPS en détection temps réel,
- Latence inférieure à 100 ms,
- Détection fiable sur objets courants (personnes, animaux, véhicules, etc.)
Applications concrètes
- Caméras de surveillance intelligentes, capables d’alerter en cas d’intrusion sans passer par le cloud,
- Drones autonomes qui détectent et suivent des cibles en temps réel,
- Systèmes embarqués dans les véhicules, pour la détection d’obstacles ou de panneaux,
- Lunettes connectées pour personnes malvoyantes, qui identifient objets et personnes à proximité,
- Robotique mobile (robots de livraison, de nettoyage ou industriels).
Conclusion
Faire tourner des modèles de reconnaissance d’objets en temps réel sur du matériel embarqué est désormais une réalité. Grâce aux outils comme TensorFlow Lite, ONNX Runtime, ou encore TensorRT, et à des modèles bien choisis et optimisés, il est possible de déployer de véritables systèmes d’IA embarqués efficaces, rapides, et économes en ressources.
Ces technologies ouvrent la voie à un monde d’objets intelligents, autonomes et interconnectés, dans lequel l’intelligence n’est plus centralisée, mais embarquée au cœur des usages.